8.10.2013, Anne Onidi - Aline Clerc et Barbara Pfenniger / Photo: Steshkin Yevgeniy/shutterstock.com
47,5% des viandes de notre test révèlent la présence de bactéries résistantes aux antibiotiques. Des résultats inquiétants, révélateurs d’un grand problème de santé publique.
Pauvre en graisse, vite préparée et peu coûteuse, la volaille a la faveur des Helvètes. C’est même la deuxième viande la plus consommée après le porc. Son succès croît de manière phénoménale, puisque chaque Suisse en mange aujourd’hui en moyenne 3 kilos de plus qu’il y a vingt ans. La chair de poulet ou de dinde séduit donc, mais inquiète aussi, sa qualité microbiologique étant sérieusement remise en cause.
Et notre test confirme la méfiance qu’elle inspire, puisque sur les 40 échantillons que nous avons confiés à notre laboratoire, 19 contiennent des bactéries résistantes aux antibiotiques. En mars 2012, nos confrères de l’émission alémanique Kassensturz faisaient la même constatation, tout comme l’association hollandaise de consommateurs, qui effectuait une campagne similaire. Et cette préoccupation ne concerne pas que l’Europe. Consumer Reports, aux Etats-Unis, a également relevé des taux élevés de bactéries résistantes aux antibiotiques dans la viande de dinde.
Mauvaises pratiques
Mais qui sont au juste ces bactéries résistantes aux antibiotiques et quel danger représentent-elles pour la santé? Pour mieux les cerner, il faut d’abord savoir que les antibiotiques sont utilisés pour venir à bout d’infections d’origine bactérienne chez l’homme et l’animal. La résistance apparaît lorsque les antibiotiques sont administrés de manière inadéquate. Or, en médecine vétérinaire, les mauvaises pratiques foisonneraient. Ainsi, dans certains élevages, tout le troupeau peut se voir traité, alors que seuls quelques individus sont malades.
Si les bactéries s’avèrent inoffensives, leur capacité de résistance n’inquiète pas directement. Le problème réside dans le fait que la résistance peut être transmise à d’autres bactéries, celles-là nocives. Les infections dues à des bactéries résistantes – qui peuvent survenir dans les plaies, les poumons, le sang ou les voies urinaires – sont en effet difficiles, voire impossibles à traiter. D’après les estimations des autorités de santé de l’Union européenne datant de 2009, 25 000 personnes mourraient chaque année d’une infection à bactéries résistantes aux antibiotiques. Et le nombre d’infections de ce type augmente.
A l’hôpital universitaire de Zurich, rien que pour un type de bactérie, on a comptabilisé 161 cas en 2010, contre 30 cinq ans auparavant.
Eviter la prolifération
Deux bactéries préoccupent plus spécialement les autorités médicales: le SARM (pour staphylocoque doré, résistant à la méthicilline) et le BLSE (pour Bêta-lactamase à spectre étendu). Notre laboratoire a donc traqué ces indésirables ainsi que le Campylobacter, principale cause de gastro-entérite dans le monde. Résultat des courses: sur les 40 viandes de poulet et de dinde achetées dans la grande distribution, 19 contiennent l’une et/ou l’autre de ces bactéries résistantes aux antibiotiques. Un constat: les échantillons de viande importée sont plus touchés. La volaille bio étant encore marginale dans les étals, nous ne l’avons pas incluse dans notre sélection.
Qu’on se rassure, la viande bien cuite ne contient plus de bactéries actives. Mais la volaille crue peut en revanche contaminer les personnes ou d’autres aliments consommés sans cuisson si les règles d’hygiène ne sont pas appliquées. Adopter les bonnes pratiques à la cuisine est donc plus que jamais essentiel.
Voir les résultats du test des volailles suisses et importées



